Le Soleil Vert d'Acapulco, Mexique, Vogue en mars.

Avec et écrit par Clara Benador


Les rues moites. Je grandis avec les palettes, les pinceaux, les faux-cils. Fards et néons, une voiture m’attend. J’ai oublié mon planning chez une amie qui fait Vogue. J’ai le blues des couvertures.


Trois filles. Deux Garçons et l’équipe. L’éditrice et le chauffeur.

18 ans.

Bruyant et tapageur, j’ai mes disques avec moi. Je pense souvent à la musique quand je n’en écoute pas. Les salles de bains où les refuges des timides.


Le plus beau voyage était défrayé. Deux t-shirts, un jean, une petite trousse rouge, un lip gloss sans gloss, un Polaroid. Deux semaines au Mexique, j’ai oublié où était la maison blanche qui surplombait la plage. La piscine était parfaite, les cocktails sucrés et les Land Rover.


Il fallait partir vers huit heures. Le maquillage commençait à 5h30, il y avait une personne pour nous quatre. Je dormais plus que les autres, je m’en fichais.

Des robes toute la journée pour les collections. Elle m'a donné une robe, j’ai cru à une invitation. Le soir, dans un bar, je l’ai vue danser avec un garçon.

J’ai goûté tous les cocktails du bar, le chauffeur aussi. Le lendemain, je me suis réveillée pour faire les portraits. Mémoire vivante de cette journée, encore ivre de chaleur et de rage. Publication numéro de juillet.

Heureusement, il y avait la piscine. Un bond et j’étais congédiée pour deux heures. Le maquillage, les cheveux, tout recommencer. J’adore tout recommencer, surtout si ce sont les autres qui le font avec moi. Un groupe, je n’en avais jamais eu. San Cabos, Mexique, Playa Revolcadero, quelque chose comme ça.


Les pauses de 9 minutes et 37 secondes. Une chaleur à se cogner la tête. Être contente du moment passé à devenir un moment éternel. Treize secondes avant d’être éternelle derrière le splash, je saute à l’eau s’il ne prend pas de photo.


Elle n’avait jamais rien eu d’autre que sa veste en cuir. Pas de maquillage, juste des boots, ses cheveux lâchés, l’air de fuir, ses airs fous. Une démarche pressée, elle filait entre les regards, entre les verres posés sur les tables, entre les vies des autres. On la voyait et puis plus rien. Juste une traînée d’air, une ombre de cuir noir, une impression d’avoir rêvé.

Le troisième jour, trois siestes et six Polaroids.


J’avais dit, sur un coup de tête, que je voulais tout arrêter pour faire la sieste. L’équipe avait continué sans moi, après tout, les deux autres modèles étaient bien. Je me suis réveillée à temps pour les photos au bord de la piscine. Il faut croire au bleu du rêve.


Le soir, on jouait aux cartes et au Monopoly. Ils me laissaient gagner.

Le soleil d’Acapulco avait suivi son cours et nous avions pris un vol de retour. C’était encore juste là, suspendu dans l’air. Dans deux jours, je partirais à Milan. Mon maillot rouge fraise était resté sur la chaise longue.

Parfois j’oublie les noms, les mesures. J’ai une carte, qu’ils appellent composite, dans mon sac. Je me change, je vérifie ce qu’il y a d’inscrit. Comme un faux passeport, un témoin discret d’une beauté figée, sur un bout de carton rose, lettres fines, calligraphiées comme avant. J’adore les chiffres. Un déjeuner à 3 dollars. Plage. Huile à bronzer. Dites-lui que je l’aime.

Fin.

Using Format